Un village français entre en résistance contre McDonald’s

21 avril 2018 à Dolus-d'Oleron © AFP

Anguille persillée et vins locaux versus fast-food: contre l’ouverture d’un McDonald’s, un village français a inauguré samedi une Zone d’alimentation durable, clin d’oeil aux « ZAD », ces sites occupés par des opposants à un projet qui font florès en France.

« MacDo No on Oléron » résume une affichette en franglais à l’entrée de la Cailletière, ancien domaine agricole de 4 hectares longtemps vaincu par les ronces, et situé sur la petite commune de Dolus d’Oléron, sur l’île éponyme du sud-ouest de la France, destination touristique réputée pour son charme tranquille.

Gregory Gendre, maire engagé
Gregory Gendre, maire engagé© AFP

Depuis quatre ans, Grégory Gendre, maire du village de 3.200 habitants, se bat en justice contre un projet de construction du géant du « fast-food ». Mais, explique-t-il, « nous ne voulions pas rester sur la défensive, nous voulions créer une alternative ».

La mairie et des bénévoles ont ainsi transformé le site supposé accueillir l’enseigne américaine en « laboratoire à ciel ouvert » des nouvelles pratiques de l’alimentation durable.

Stands proposant des huîtres naturelles, anguille persillée ou vins locaux, ateliers de cuisine, conférences : l’ambiance se veut bon enfant pour la première manifestation du projet, coordonné par le « Mouvement pour une alimentation citoyenne sur Dolus d’Oléron », dont l’acronyme forme un ironique « MacDol ».

Dans cette nouvelle ZAD, dont l’acronyme sonne comme les « Zones à défendre » qui ont fleuri en France ces derniers temps, notamment celle de Notre-Dame-des-Landes (ouest) qui vient d’être évacuée, on défend « un véritable choix de société » pour « le bio et les circuits courts » et contre « des modèles de franchise sans aucun lien avec les territoires ».

A la Cailletière, le maire prévoit une cantine associative et un skate-park. Sans compter à terme des champs en « culture biologique », une « couveuse agricole »…

En quelques années, le conflit de M. Gendre avec la multinationale est devenu « symbolique ». Les implantations de McDonald’s ont plus d’une fois rencontré de vives résistances en France, pays de la bonne chère qui a souvent accusé la multinationale de servir de la « malbouffe ».

Tout commence en 2014 lorsque la liste emmenée par Grégory Gendre, alors 36 ans, fondateur de « Roule ma frite », entreprise recyclant les huiles de friture en carburant, emporte l’élection municipale.

A l’époque, le projet de construction d’un « MacDo », comme on dit en France, divise déjà les habitants et le jeune candidat en a fait un argument de campagne contre la municipalité sortante, favorable à cette implantation dans une petite zone commerciale.

La nouvelle municipalité refuse à trois reprises la demande de permis de construire mais la multinationale et le propriétaire du terrain, Philippe Villa, ex-maire adjoint et désormais élu d’opposition, en appellent à la justice administrative.

Un village français entre en résistance contre McDonald's
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Cow-boy

En septembre 2017, le tribunal de Poitiers (centre-ouest) impose à la mairie d’accorder le permis et la contraint à payer « 300 euros par jour de retard ». Pas question pour Grégory Gendre : la mairie fait appel et des collectes sont organisées pour payer l’astreinte, ayant pour l’heure récolté 32.000 euros, selon l’édile.

Depuis, l’atmosphère dans la commune s’est tendue, ces « astreintes » financières inquiétant une partie des habitants.

A une pétition contre le projet ayant recueilli 3.600 signatures, un collectif favorable à l’installation du restaurant met en avant les « 40 CDI et 30 CDD qui ne se refusent pas ». Il réunit 2.000 membres sur Facebook.

Un village français entre en résistance contre McDonald's
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En février, un « projectile » vise une fenêtre chez Philippe Villa. Début avril, des graffiti « Estocade d’Oléron », « ZAD vaincra », sont tagués sur un mur du domicile d’un membre de sa famille. Deux plaintes sont déposées. « On n’a rien contre un projet alternatif, mais on refuse que, pour des convictions personnelles, le maire empêche les gens d’avoir accès à un commerce quel qu’il soit », explique à l’AFP Marc, membre du collectif pro-MacDo. « C’est du gâchis d’argent des contribuables », déplore ce graphiste de 51 ans qui critique un maire agissant comme un « cow-boy dans son village ».

L’audience devant la cour d’appel administrative de Bordeaux (sud-ouest) est attendue mi-juillet. Si la justice autorise MacDo à s’implanter sur l’île d’Oléron, les habitants auront un choix inédit : MacDo ou MacDol.

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